Origines

Le dialogue entre psychanalyse et neurosciences est relativement neuf. Pour une part il s’organise depuis 1999 au sein de l’International Neuropsychoanalysis Society (NPSA). L’approche de la NPSA, soutenue par Mark Solms, son fondateur, est essentiellement neuropsychologique et constructiviste, à partir d’une épistémologie dite de dual-aspect monism (monisme à double aspect, une approche psychologique, une approche neuroscientifique).

En France fut créé en 2006 le ‘Cercle de Neuropsychologie et de Psychanalyse’, le CNEP, sous l’égide de Daniel Widlöcher et avec e.a. Lisa Ouss, présidente, Catherine Fayada, Anne Boissel, Ariane Bazan et René Roussillon. Le CNEP a organisé des colloques et des séminaires, mais faute de moyens institutionnels, ceux-ci ont été interrompus.

Avec le RFPN, nous reprenons le flambeau du CNEP. En effet, nous pensons que la métapsychologie psychanalytique peut apporter aux neurosciences – qui sont souvent multidirectionnelles au niveau des dynamiques neuronales – des hypothèses heuristiques pour l’interprétation parcimonieuse des données, ainsi qu’à la psychologie un cadre intégratif entre neurosciences et démarche clinique, par exemple par le biais d’une lecture rationnelle et scientifique d’éléments cliniques souvent inclassables, tels le refoulement, les lapsus, la compulsion de répétition, etc. 

En parallèle, il apparait que des travaux scientifiques dans le domaine sont, depuis quelques années, de plus en plus pointus (ex. Shevrin, Ansermet Carhart-Harris, Bazan, Wernicke, Marron) et qu’ils ont pu susciter l’intérêt de neuroscientifiques (ex. Alberini, Friston, LeDoux, Gallese, Magistretti) tout en contribuant au débat sur la scientificité de la psychanalyse. On a vu se distinguer les neurosciences francophones par une ouverture intellectuelle à la spécificité de ce qui fait l’appareil psychique (ex. Berthoz, Cohen, Falissard, Georgieff, Jeannerod, Koechlin, Rossetti, Tassin). En effet, il peut y avoir dans l’épistémologie francophone, au sein des neurosciences, des approches qui ont aussi l’art de subvertir les modèles existants, par exemple quand Marc Jeannerod propose de comprendre la représentation en aval de l’intention motrice – et non en amont de l’action motrice. Du côté de la psychanalyse, la spécificité́ Française est aussi l’apport de quelques écoles : parmi d’autres, celle, dans la continuité d’acteurs tels que Jean Laplanche, André Green et Daniel Widlöcher, avec les apport de René Roussillon et ses collègues à Lyon sur le symbolisme et la créativité et celle aussi dans la continuité d’un acteur tel que Jacques Lacan, qui permet une piste d’intégration générative du côté de la psycho- et neurolinguistique en particulier (ex. Bazan, 2007).

Il nous semble précieux de formaliser l’effervescence intellectuelle, académique et de recherche dans le monde francophone afin de mieux représenter cette voix au niveau international dans le débat – qui est en fin de compte le débat de fond des rapports corps-esprit – et d’en faire un acteur fort. Outre une collaboration avec la NPSA, l’idée est aussi celle d’une participation dans le dialogue des sciences au niveau des neurosciences cognitives, de la philosophie et de la clinique psychologique. Finalement, une autre valeur ajoutée spécifique du RFPN serait de représenter une voix qui se veut apaisante et constructive dans le débat et dans la controverse autour de la scientificité́ de la psychanalyse et de sa pertinence clinique, débat parfois particulièrement véhément dans le monde Francophone. 


N’oublions pas que les petites émotions sont les grands capitaines de nos vies et qu’à celles-là nous y obéissons sans le savoir.

Vincent Van Gogh, Lettre à son frère Théo, 1872-1890